Marianne et Michel

 

Marianne, figure emblématique de la République

C'est sans conteste la plus populaire des femmes françaises ! Pourtant, qui saurait dire comment elle s'est lentement imposée à nous ?

Son buste trône aujourd'hui en bonne place dans toutes les mairies de France. Personne n'ignore que son visage et ses attributs symbolisent la République, le patriotisme et la liberté : mais surtout que son apparition est intimement liée à l'histoire de notre pays.

Quand liberté rime avec féminité

Lorsque la Révolution Française éclate en 1789, le culte de la liberté est lancé avec enthousiasme. Et la représentation symbolique de cet élan s'incarne naturellement dans l'image de la femme drapée à l'antique portant un bonnet phrygien. Un héritage direct en somme d'une tradition gréco-latine, mais également une référence aux esclaves de l'ancienne Rome coiffé d'un bonnet phrygien, qui en 1789 est récupéré comme signe de la liberté.
A la proclamation de la première République en 1792, la France adopte cette représentation. En outre, liberté, France et République s'ennoncent au féminin et coïncident parfaitement à cette image.
Cette même année apparaît pour la première fois le nom de Marianne au nom de la République ou de la France en Révolution. Prénom très populaire à l'époque, il convient bien à l'idée d'une Révolution issue du peuple et qualifiera la femme au bonnet.

Trois quarts de siècle d'opposition

Entre 1800 et 1870, la situation politique de la France est instable et les régimes se succèdent.

Sous le 1ére Empire, la Restauration, la Monarchie de juillet, Marianne devient une opposante. Cependant, sous la seconde République (1848 - 1852), elle remplace à nouveau les emblèmes et effigies royales. Selon les républicains conservateurs ou révolutionnaires sa représentation différe. Ainsi la République conservatrice au pouvoir arbore une Marianne aux postures solennelles, l'air grave et rejette le bonnet phrygien. En revanche l'image de la République pour les révolutionnaires est incarnée par une femme en mouvement, juvénile, ardente et déterminée, légèrement vétue mais portant un bonnet rouge. Le second Empire (1852 - 1870) relègue une fois de plus Marianne dans l'ombre.

Le triomphe de Marianne

Avec la III° République, Marianne forte de son bonnet reprend le pouvoir. Les bustes font donc leur entrée dans les mairies où ils sont associés au drapeau tricolore comme à la devise républicaine. Pour le prochain millénaire Marianne aura un nouveau visage. Les 36000 maires de France on élu Laetitia CASTA Marianne de l'an 2000.


Repères :

22 septembre 1792 : Proclamation de la République. La représentation de la femme à bonnet phrygien symbolise la République et la liberté.

1er janvier 1849 : La réforme postale entraîne la création d'un timbre poste à l'effigie de Marianne.

1870 à 1940 : Près de 440 monuments à la gloire de la république sont édifiés dans toute le France.

1871 à 1879 : La République de Ducs impose des modèles de Marianne avec une couronne composée de végétaux et surmontée le plus souvent d'une étoile à 5 branches.

1880 : A partir de cette date, l'effigie de Marianne brille au final des feux d'artifice du 14 juillet.

1891 : Le Petit Journal publie en "Une" le buste officiel de la République. Il est adopté par 164 députés comme "la figure personnalisant le mieux la république".

1969 : Brigitte Bardot prête son buste pour la République.

1978 : Mireille Mathieu devient Marianne.

1985 : Catherine Deneuve pose à son tour.

23 novembre 1999 : présentation publique de la Marianne de l'an 2000, lors de l'ouvertue du 82° congrès des Maires de France.

 

 

Le Michel allemand

 

Il ne donne pas l´impression d’être robuste ni sûr de soi, comme le John Bull anglais, il n´a pas non plus l’attitude ´smart´ de l´oncle Sam, pas plus que le tempérament ni le maintien de Marianne.

Avec ses pantalons froissées, qui pendent sur les genoux et son bonnet de nuit enfoncé sur sa tête joufflue de chien fidèle, le Michel allemand a tout d´un nigaud. Il n’y a donc pas de quoi s´étonner si sa carrière s´arrête aux frontières de son pays.

On ne le connaît ni en France, ni dans les autres pays limitrophes de l ´Allemagne. Evidemment, car il ne saurait représenter l´Allemagne des penseurs et des poètes, et encore moins l’état militariste de Guillaume II ou du national-socialisme. Il se tient là, tout seul, face aux autres personnages allégoriques représentant une nation, attendant d’être enfin reconnu comme ambassadeur de l´Allemagne.

Pourtant, le Michel allemand possède une carrière bien rempli. Au 16e siècle, on appelait, en France, `Michels allemands` les pieux garçons allemands qui, en groupes, se rendaient en pèlerinage au Mont Saint-Michel. Un siècle plus tard, pendant la guerre de trente ans, le Michel allemand devint, du fait de Michael Elias von Obentraut, qui menait les chevaliers du prince électeur palatin, le symbole de la vaillance et du courage teutons. Entre les guerres de libération et la révolution de 1848, Michel tourna au bonhomme. Heinrich Heine a dit de lui :

« Un jour, par désespoir, je voulus mettre le feu à son bonnet, mais il était si plain de la sueur que son propriétaire avait versée dans ses réflexions, qu’il n’en sortit qu’une fumée anodine, tandis que Michel souriait dans son sommeil.»

Ce texte, ainsi que beaucoup d´autres, exprime l´amertune, la haine et la moquerie à l’égard de ce petit bourgeois endormi dans l ´Etat veilleur de nuit qu´était l´Allemagne d´alors.

Michel devait changer. Lorsque les premières fanfares du nouveau nationalisme retentirent, il se réveilla pour devenir un athlète musculeux, devant guérir le monde.

Michel a survécu les deux guerres mondiales a peine la guerre  terminée, il revient dans la presse allemande. D’abord, il apparaît sous la forme d´un garçonnet, portant les stigmates de la guerre qui l´a mis à terre, et duquel on ne peut guère attendre de réparations. Sous son bonnet de nuit, il jette un regard innocent, en quête d´un peu de compréhension, de pitié et de chaleur.

Mais bientôt, il grandit, se révolte contre ses pères nourriciers que sont les alliés. Au cours du ´miracle économique´ il gagne en âge et en stature, et devient même l´amant et l´époux de Marianne